L'alimentation, dans un élevage quel qu'il soit, est d'une importance capitale, non seulement parce qu'elle constitue en général le poste de dépenses le plus lourd, mais aussi parce qu'elle conditionne directement la production, à la fois en qualité et en quantité. De plus, son influence sur l'état sanitaire du cheptel, est indéniable.
Dans les différentes études que nous avons publiées sur l'alimentation du pigeon, nous nous sommes efforcés de sortir des sentiers battus pour donner aux éleveurs la possibilité d'améliorer leurs résultats. C'est ainsi que nous avons mis en cause les graines de légumineuses, et notamment la féverole, jusque là très largement utilisées et dont le prix est pourtant presque toujours hors de proportion avec la valeur alimentaire réelle de ces produits. Nous considérons qu'il faut leur préférer un aliment composé granulé dont le choix est fonction de sa destination.
En effet, suivant qu'il est donné à l'exclusion de tout autre nourriture, c'est à dire en aliment complet, ou en complément des céréales, c’est à dire en complémentaire, sa composition peut varier très sensiblement.
Quoi qu'il en soit, et c'est à notre avis une bonne chose, l'utilisation des aliments composés a tendance à se généraliser pour les pigeons, comme cela s'est déjà produit pour les autres animaux. Il reste cependant que l'alimentation exclusive aux granulés demeure délicate et coûteuse, tandis que l'alimentation mixte (grain + granulés) semble plus passe‑partout, au moins dans l'état actuel des connaissances.
Les recherches que nous avons réalisées dans ce domaine, ainsi que les divers recoupements que nous sommes amenés à faire, confirment que le mode de vie et surtout de reproduction du pigeon, constitue un handicap certain quand il s'agit d'opter pour l'aliment complet. Il est certain, et nous l'avons déjà souligné, que les besoins du pigeon varient considérablement suivant son âge et sa condition du moment. En conséquence, il paraît peu logique d'envisager de donner dans tous les cas, le même aliment, même si dans son jeune âge, cet oiseau est capable de compenser, au moins dans une certaine mesure, la qualité par la quantité.
Quant aux possibilités du pigeon d'équilibrer lui‑même sa ration alimentaire, et sans chercher à nier une certaine évidence dans ce domaine, les constatations très différentes que nous avons pu faire avec des sujets placés dans des conditions identiques, nous ont toujours incités à la prudence.
En tout état de cause, il nous a semblé intéressant de rapporter ici les résultats obtenus par un groupement d'éleveurs de pigeons de chair qui, avec un aliment titrant 20 à 22 % de protéines, ont constaté une bonne croissance des tout jeunes pigeonneaux, alliée à un emplumement rapide. Cependant, à l'âge de l'abattage, ces oiseaux n'étaient pas suffisamment en chair. De plus, leurs fientes étaient passablement liquides. Par contre, avec un granulé titrant 24 % de protéines, donné en complément du maïs grain, ces inconvénients disparaissent. Notons que la proportion dans la consommation est d'environ un tiers de granulé pour deux tiers de grain, ceci avec des couples en production, évidemment. Dans les deux cas, l'aliment a été fabriqué spécialement pour le groupement.
Sans chercher à tirer des conclusions définitives, il est possible d'émettre quelques hypothèses.En premier lieu, il convient de préciser que les reproducteurs qui ont fait l'objet de ces essais, avaient été initialement, davantage habitués au grain, qu'au granulé, ce qui pourrait expliquer une adaptation incomplète ou trop lente à l'aliment complet. Il est possible également que l'on trouve là la cause de la production de déjections molles. D'une facon générale, il semble bien que les pigeons qui consomment des granulés surtout lorsqu'ils n'ont que cela à leur disposition, aient tendance à boire davantage en particulier lorsqu'ils nourrissent bien sûr, et dans ce cas la disproportion est encore plus grande. Pour notre part, nous avons constaté à ce sujet, des différences considérables entre les couples reproducteurs, certains ayant la fâcheuse habitude de gorger littéralement leurs petits de liquide, surtout lorsque ceux‑ci ont atteint l'âge de deux semaines. Il est alors très difficile de maintenir les nids dans un état convenable.
Peut‑être faut‑il voir dans cette forte consommation d'eau susceptible de modifier le métabolisme, l'impossibilité pour les jeunes de s'étoffer entre l'âge de deux et quatre semaines ? Peut‑être aussi doit‑on considérer qu'une alimentation riche en protéines, convient moins bien aux pigeonneaux âgés de plus de quinze jours ? Nous avons d'ailleurs très souvent remarqué que les reproducteurs habitués aux granulés, et qui ont également du grain à leur disposition, ne commencent à donner ce dernier à leurs petits que lorsque ceux‑ci ont atteint l'âge d'une douzaine de jours. Peut‑être l'énergie du maïs lorsqu'elle remplace partiellement celle des protéines de l'aliment permet elle d'obtenir une meilleure finition ? Peut‑être que la consistance du grain contribue elle aussi à ce résultat puisque chez le poulet notamment, on sait que le maïs est mieux utilisé entier que moulu ? Peut‑être encore certains composants de l'aliment peuvent‑ils être à l'origine d'une plus forte consommation d'eau, comme c'est le cas par exemple pour les proportions élevées de matières minérales ?
Autant d'explications qui restent plausibles sinon probables. Toujours est‑il que dans la pratique, et en attendant d'en savoir davantage sur le sujet, l'alimentation mixte grain + granulés, est celle qui est la plus recommandable dans la majorité des cas. De plus, elle est moins onéreuse, en particulier pour les pigeonneaux sevrés qui consomment nettement plus de grain que de granulés.
Nous conseillons néanmoins de maintenir en toute circonstance, une distribution de granulés, de façon que les futurs reproducteurs gardent l'habitude d'en manger plus ou moins. Rappelons enfin qu'il ne faut jamais lésiner sur la qualité de la nourriture, qu'il s'agisse du grain ou des granulés ; procéder autrement consisterait, à coup sûr, à faire de fausses économies.
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